Financer et rentabiliser une oeuvre culturelle

A l’heure ou 450 000 films seraient piratés chaque jour et ou 1 nouveau talent sur 5 ne pourrait être produit, il est normal de se demander quels modèles économiques utiliser pour le financement et la rentabilisation des oeuvres culturelles.

Hier le financement d’une oeuvre culturelle était en majorité effectuée par des sociétés qui investissaient dans des œuvres qu’elles pensaient pouvoir être profitables.
Pour être profitable à coup sûr (ou presque) une oeuvre devait répondre à certains critères comme avoir des acteurs bancables ou un scénario éprouvé. Aussi par manque de goût pour le risque les investisseurs préféraient-ils les films répondant à ces critères. Il était donc délicat pour ceux voulant proposer autre chose de faire produire leur film (heureusement l’état en aidait certains).

Aujourd’hui même si ces modèles sont toujours existant nous nous dirigeons vers leur renouvellement.

Deux grands courants se proposent de remplacer les modèles actuels. Le premier prône la culture gratuite et certains de ces membres vont jusqu’à penser que toute industrie basée sur celle-ci ne peut que la pervertir. L’autre prône une évolution des moyens de distribution et phases de vie des œuvres.

Le tout gratuit.

L’idée du tout gratuit ne suppose pas que les artistes fournissent un travail sans contrepartie financière, mais plutôt que les consommateurs aient accès aux œuvres culturelles qu’ils désirent sans avoir à payer ou en payant un forfait.

L’idée de base de ce modèle est le mécénat.

Mécénat privé

Le mécénat privé est le fait d’avoir une œuvre financée par une ou plusieurs entreprises ou particuliers qui n’auraient pas de volonté de retours autres que l’association de leur image à l’œuvre sponsorisée.
Ce mécénat se rapproche du modèle de placement produit très en vogue en ce moment, modèle qui permet à une société comme Heineken d’associer son image à celle de James BOND. Bien entendu un tel mécénat aura tendance à être relativement peu désintéressé et le renoncement à tout profits directement liés à l’exploitation de l’œuvre est remplacé par une volonté de tirer profit de l’aura de celle-ci (le plus souvent pour accroître des parts de marcher).

Mécénat global / licence globale

Le mécénat global et la licence globale sont deux approches visant à faire financer les œuvres par les consommateurs sous la forme d’un abonnement. L’internaute verserait chaque mois une somme fixe qui serait ensuite répartie selon ses choix (mécénat globale) ou sa consommation (licence globale). Le coût pour l’internaute serait fixe et on se rapproche ici de ce que propose les cartes d’abonnements illimités de cinéma ou encore les abonnements aux sites de musiques en ligne. La grande différence est que les œuvres sont utilisables sans contrainte dans le temps et l’espace.

Les nouveaux modèles payant

Sans aller aussi loin que les modèles gratuit il existe des modifications simples aux modèles existant qui permettraient de les rendre plus en accord avec la nouvelle donne technologique.

Le recentrement sur le service. La rentabilisation des films passent en grande partie par la vente de DVD/BluRay et les passages à la télévision, hors la vente de DVD n’offre que très peu d’avantages par rapport à un téléchargement gratuit et la télévision est elle même en pleine crise et doit se restructurer. En Angleterre les ventes de places de concerts rapportent maintenant plus que les ventes de CD, le concert à une valeur ajoutée forte qu’il est impossible de dématérialiser. De même l’expérience sociale (formation d’un groupe autour d’un intérêt commun) et le confort qu’offrent le cinéma sont difficiles, voir impossible à reproduire. Il est de plus tout à fait envisageable de multiplier les rencontres avec les équipes des films projetés et les débats après projection, la rencontre avec les artistes et l’échange d’idées étant des facteurs différenciant forts.
Dans cette optique la chronologie des médias et l’interdiction de l’échange sur Internet deviennent caduc et même pénalisant pour le succès du film. En fait dans le futur on devrait tomber sur un modèle bien connu par les éditeurs de logiciels qui est l’essai avant l’achat.

Schéma de la chaîne d'adhésion consommation d'une œuvre

Dans ce modèle le consommateur paye pour une œuvre dans laquelle il se reconnaît et qu’il à envie de soutenir, il sera tout à fait prêt à payer une place de cinéma ou de concert pour partager avec d’autres l’expérience de l’oeuvre et/ou rencontrer l’artiste. Il pourra même acheter le CD ou le DVD à condition que celui-ci ait une vraie valeur ajoutée (édition collector).
Il est aussi plus que temps d’abandonner la vente de support pour se concentrer sur la vente des œuvres, ainsi tout achat d’un morceau ou d’un film devrait donner droit à la garantie de pérennité du bien. Ainsi lors du passage d’une technologie à une autre il faudrait pouvoir procéder pour rien ou pour un coût très faible au remplacement de ses médias dépassés et lors de la détérioration de ceux-ci un remplacement devrait être possible.

Autre voie d’exploration les agents intelligents, ces agents vous offriraient une nouvelle expérience d’accès aux œuvres culturelles (livres, films, cd, jeux) en sélectionnant pour vous celles qui s’approchent le plus de vos goûts ou de votre humeur du moment. Nous sommes aux balbutiements de ces agents avec des services comme Lastfm qui ne demandent qu’à grandir si on le leur permet.

Le financement intelligent.

Le financement des œuvres déjà abordé, est lui aussi en pleine évolution. En plus des traditionnels placements produits (savez-vous que le ticket d’entrée pour un placement dans « quantum of solace » était de 10 millions alors que le film en a coûté 200 ?), aide de l’état et investissement classique on trouve maintenant du crowdfunding (financement par la masse) qui consistent pour des personnes lambda à regrouper leur moyen financiers afin de permettre la réalisation d’un projet.
Le crowdfunding permet l’application du principe de longue traîne à la production culturelle et favorise même la promotion des artistes ainsi produit grâce à l’attachement qui se crée de facto entre l’artiste et ses producteurs/supporters.
Le modèle est gagnant/gagnant puisque l’artiste peut se concentrer sur son œuvre plutôt que sur la recherche de fonds et que les producteurs reçoivent une partie des bénéfices générés par l’exploitation de l’œuvre qu’ils ont permis de produire.

L’ensemble de ces changements peut sembler hasardeux pour certains mais l’évolution nous permet de nous libérer de limitations tel que l’achat d’un support physique plutôt que de l’œuvre elle même ou la limitation des œuvres disponibles, et c’est une ère nouvelle et pleine de promesse qui s’ouvre à nous.

Sources:

Crowdfunding

Placement produit

Licence globale / Mécénat

Nouveaux modèles payant

Divers

yann madeleine

4 commentaires

Les commentaires sont fermés.